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VERDICT DIFFICILE : Une partie de la communauté scientifique est sous pression

/// Au cours des dernières décennies, les fluctuations météorologiques extrêmes causées par le changement climatique perturbent la biodiversité et les écosystèmes. Cette tendance pourrait altérer l'apparition des maladies saisonnières telles que la grippe, les rhumes et les allergies. De plus, elle pourrait favoriser la propagation de maladies infectieuses transmises par les moustiques, telles que la dengue, le chikungunya et le virus Zika. ///

VERDICT DIFFICILE : Une partie de la communauté scientifique est sous pression

De nombreux chercheurs peinent à conclure sur les relations complexes entre les effets liés au réchauffement climatique et l’accroissement des maladies infectieuses
Virus de la DENGUE - https://www.science-technologie.com/
/// Coupe transversale d'un virus de la dengue montrant les composants structuraux /// Credit : Wikipédia - Traduction S&T
Début juillet 2024, lors d’une des journées les plus chaudes jamais enregistrées à l’échelle mondiale, un scientifique se questionne. Comment doit-il répondre aux questions sur la manière dont le réchauffement climatique affecte les maladies infectieuses. Des cas de paludisme transmis localement non pas été observés depuis des décennies, ce qui avaient fait la une des journaux. Car en effet, le réchauffement climatique que l’on connaît pourrait entraîner des changements majeurs dans le paysage des maladies infectieuses. Les scénarios potentiels de catastrophes sont nombreux : une multiplication rapide et une propagation élargie des moustiques et des tiques porteurs de pathogènes, exposant ainsi un nombre croissant de personnes ; des sécheresses et des inondations plus fréquentes susceptibles d’exposer davantage de personnes à des microbes mortels transportés par l’eau, tels que la bactérie Vibrio cholerae responsable du choléra ; des interactions entre animaux migrateurs et espèces nouvelles pouvant entraîner la propagation de pathogènes vers de nouveaux hôtes animaux et, éventuellement, vers les humains ; des modifications des schémas d’infections respiratoires ; et une adaptation des champignons, habituellement repoussés par la chaleur corporelle, aux températures plus élevées, les rendant plus aptes à infecter les humains. Cependant, les cas de paludisme que l’on connaît ne pouvaient probablement pas être imputés au changement climatique, car cette maladie est transmise par des moustiques différents. Cependant, les moustiques porteurs du paludisme ont toujours été présents sur presque toute la surface du globe, il suffit qu’un voyageur revienne de l’étranger avec le parasite dans son sang et qu’il se fasse piquer par un moustique compatible pour ensemencer une nouvelle propagation dans sa localité.  C’est une position délicate à laquelle des chercheurs se retrouvent souvent confrontés : entre la complexité des situations actuelles et la menace potentielle de l’avenir. Identifier cette menace n’est pas une tâche aisée. Le défi consiste à faire pour les maladies infectieuses ce que d’autres chercheurs parviennent désormais à faire pour les sécheresses ou les ouragans : « attribuer » les événements au changement climatique. « Le domaine de pointe en ce moment consiste à essayer de commencer à faire cette attribution… pour déterminer, pour chaque degré de changement de température, combien de cas supplémentaires nous pouvons enregistrer ? » La complexité est vertigineuse. Le changement climatique influence la température, l’humidité, les modèles de précipitations, ainsi que le comportement des animaux et des humains. Chaque facteur pourrait affecter les maladies de manière différente, et cet impact pourrait varier en fonction du type de maladie (virus, bactérie, parasite ou champignon) et de son mode de propagation (moustiques, tiques, autre vecteur, eau ou air). Une question est de savoir comment une maladie déjà présente dans une région réagira à l’évolution de son climat. Une autre question est de savoir si de nouvelles régions seront touchées par la propagation de maladies à mesure que le climat évolue. Et cela ne concerne que les maladies que nous connaissons. De nouvelles maladies pourraient-elles émerger avec plus de fréquence ?
C’est très loin d’être anodin, il ne s’agit pas que d’un changement minime, il est graduel dans le fonctionnement de la planète
Les conclusions revêtent une importance capitale si l’on veut préparer le monde aux défis de santé publique qui se profilent. Toutefois, établir un lien entre le climat et les maladies est un enjeu scientifique complexe enveloppé dans un défi de communication. Les chercheurs ont réalisé les progrès les plus significatifs sur la maladie du paludisme, qui tue plus d’un demi-million de personnes chaque année. Ils pensent avoir fourni le meilleur argument à ce jour selon lequel les changements climatiques ont accru le paludisme dans certaines parties de l’Afrique. Mais ce n’est pas si simple qu’il n’y paraît. La manière dont les agents pathogènes des plantes se propagent des espèces d’herbes invasives à celles indigènes a été confronté à un article de son directeur de thèse, qui a soulevé une question qui semblait plus urgente. Il soutenait que la relation entre les maladies humaines et le climat ne serait pas linéaire. De ce fait, il y a une relation entre la manière dont la température affecte à la fois les moustiques et les pathogènes qu’ils transportent. Les moustiques étant des animaux à sang froid, la température influence presque tout dans leur vie et leur potentiel de propagation de maladies : leur durée de vie, le nombre d’œufs qu’une femelle pond par jour et la probabilité de piqûre. Cela influence également les pathogènes transmis par les moustiques, déterminant par exemple leur probabilité de s’établir dans l’insecte après qu’il a consommé du sang d’une personne ou d’un animal infecté, et combien de temps cela prend. Dans le cadre expérimental, les scientifiques peuvent analyser l’impact de la température sur chaque caractéristique individuelle. Cette relation présente généralement une forme en bosse : une valeur optimale à une certaine température, suivie d’un déclin exponentiel lorsque la température s’éloigne de cet optimum, que ce soit en augmentant ou en diminuant. Ce phénomène est également observé chez les êtres humains, comme l’explique une écologiste spécialisée dans les maladies infectieuses à l’Université Cornell. Selon elle, il existe des températures qui sont trop froides ou trop chaudes, et une température idéale autour de 24°C où l’on préfère se maintenir. Cette même logique s’applique aux moustiques et aux parasites qu’ils transmettent. Des chercheurs regroupent mathématiquement toutes ces caractéristiques dépendantes de la température pour un moustique donné et le pathogène qu’il transporte dans une seule courbe. Cette courbe illustre la façon dont la transmission de la maladie évolue en fonction de la température. Cette relation en forme de bosse a des implications significatives. (voir cette article : Biologie thermique des maladies transmises par les moustiques)
Certains aiment plus la chaleur que d’autres.

La propagation des maladies transmises par les moustiques est influencée par la température, atteignant son maximum à une chaleur optimale et diminuant au-dessus ou en dessous de cette température. Les différentes combinaisons de maladies et de vecteurs présentent des seuils de température variés. Par exemple, la forme la plus dangereuse du paludisme, transmise par son vecteur de moustique habituel, connaît un pic d’activité à 25°C, une température relativement basse qui pourrait voir sa transmission réduite dans certaines régions en raison du changement climatique. En revanche, la dengue et le Zika pourraient prospérer dans un environnement plus chaud.

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Afin d’établir une courbe de transmission

Les scientifiques commencent par mesurer l’effet de la température sur de nombreux traits différents d’un pathogène spécifique et d’une espèce de moustique qui le transporte : par exemple, la durée de vie du moustique et la vitesse de réplication du pathogène dans le moustique. Le résultat est une série de courbes, qui sont combinées mathématiquement en une seule courbe reliant la température à la transmission de la maladie.

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« L’hypothèse de base stipule que le réchauffement climatique aggrave les maladies vectorielles, car la plupart de ces maladies sont observées dans les tropiques, tandis que dans des régions plus tempérées, elles surviennent en été ».

Cependant, des études démontrent que « l’effet de l’augmentation des températures peut aller dans les deux sens ». Pendant de nombreuses années, l’optimum de température pour le paludisme a été estimé à environ 31°C. Dans un article publié en 2012 dans Ecology Letters, des chercheurs ont démontré que cette estimation était erronée. Ils ont conclu que l’optimum de température était beaucoup plus bas, à seulement 25°C. Au-dessus de 28°C, la transmission diminue rapidement. « Si quoi que ce soit, le réchauffement climatique diminue en fait la transmission du paludisme dans de nombreuses régions d’Afrique subsaharienne »

En revanche, dans les régions montagneuses d’Amérique du Sud et d’Afrique australe, les températures favorisent de plus en plus la transmission du paludisme. De plus, dans les régions d’Europe et d’Amérique du Nord qui étaient autrefois touchées par le paludisme et qui ont réussi à contrôler la maladie, le maintien de ce contrôle pourrait devenir plus difficile. Cependant, se concentrer uniquement sur la relation entre un moustique, une maladie et la température ne prend pas en compte de nombreux autres facteurs liés au climat. Les modèles de précipitations changent, les événements météorologiques extrêmes tels que les sécheresses ou les inondations deviennent plus fréquents, et les mouvements de population en réponse à ces changements mondiaux auront également un impact sur les schémas de maladies.

C’est pourquoi certains chercheurs tentent de démêler les liens entre le climat et les maladies en se tournant vers le passé, en examinant les données historiques à la recherche de signes que le changement climatique a déjà affecté l’incidence des maladies dans le monde réel. Un ensemble de données sur le paludisme, provenant des plantations de thé dans les hauts plateaux orientaux du Kenya, a déclenché une lutte académique qui fait rage depuis des décennies. La société exploitant les plantations fournissait des soins de santé à tous les employés et à leur famille et tenait des dossiers méticuleux. À la fin des années 1990, un scientifique de l’Unité de recherche médicale de l’armée américaine à Nairobi « est monté dans un grenier de la plantation de thé et a réussi à identifier quelques boîtes d’admissions et de cas de paludisme remontant jusqu’en 1965 ».

Les chercheurs ont numérisé et analysé les dossiers, rapportant en 2000 qu’ils révélaient une augmentation spectaculaire du paludisme dans les années 1990. Mais la température moyenne mensuelle dans la région n’avait pas changé de manière significative pendant cette période. Les chercheurs ont noté que « d’autres facteurs que le changement climatique auraient conduit à l’augmentation précipitée du paludisme » dans les plantations de thé, pointant du doigt les programmes de contrôle des moustiques abandonnés et une « épidémie de paludisme résistant aux médicaments » balayant la région.

L’étude a déclenché un débat animé. En 2006, une nouvelle analyse des données de température des plantations a montré qu’il y avait en effet une tendance au réchauffement si l’on considérait une période de temps plus longue. Ce différend était important, car il mettait en lumière l’impact potentiel du changement climatique sur le paludisme dans les hauts plateaux. Les données médicales, parmi les rares enregistrements à long terme du paludisme, ont été examinées à plusieurs reprises. 

Dans un article ultérieur, les chercheurs ont réitéré que le climat n’avait pas joué de rôle dans la résurgence du paludisme, soulignant l’importance de se concentrer sur les véritables causes de cette résurgence. Certains chercheurs sur le paludisme s’inquiètent que l’attention croissante accordée au changement climatique ne détourne des questions plus pressantes, telles que la fourniture de mesures antipaludiques aux populations les plus vulnérables. D’autres estiment que la recherche sur le climat et la maladie commence à attirer l’attention qu’elle mérite.

Ce travail de recherche attire l’attention car il prétend avoir identifié l’impact du climat sur le paludisme. L’utilisation de méthodes par économétrie du climat pour étudier le rôle du climat dans le paludisme. Cette méthode consiste à créer des modèles basés sur différents scénarios climatiques pour estimer l’impact sur l’incidence de la maladie. En utilisant des données sur 115 ans de paludisme en Afrique subsaharienne, l’équipe de recherche a pu simuler des mondes alternatifs sans changement climatique pour comparer l’incidence du paludisme dans ces scénarios avec le monde réel. Cela leur a permis d’estimer les conséquences du changement climatique sur l’aggravation de la maladie.

Dans un document préliminaire plus tôt cette année (voir cette article : L’empreinte historique et l’impact futur du changement climatique sur le paludisme infantile en Afrique), l’équipe de recherche a indiqué qu’il y avait une probabilité de 66 % que le changement climatique d’origine humaine ait déjà augmenté le paludisme en Afrique subsaharienne dans son ensemble. Ils estiment qu’environ 84 cas de paludisme par tranche de 100 000 enfants âgés de 2 à 10 ans peuvent être attribués au changement climatique à tout moment. Bien que cela puisse ne pas sembler significatif, avec environ 300 millions d’enfants dans cette tranche d’âge en Afrique subsaharienne, cela signifie qu’il y aurait probablement actuellement plus de 200 000 cas de paludisme dus au changement climatique. Cet impact est plus prononcé en Afrique orientale et australe, tandis que le changement climatique a probablement réduit le paludisme en Afrique occidentale et centrale au fil du temps, ont conclu les chercheurs.

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/// Une femme à Lagos, au Nigeria, fait partie des centaines de millions de personnes qui développent le paludisme chaque année. Une analyse suggère que le réchauffement a probablement augmenté le paludisme en Afrique subsaharienne.. /// Photo : Alarmy

« Notre recherche résout un débat ancien sur l’un des premiers impacts sanitaires du réchauffement climatique »

Toutefois, cette étude n’a pas encore été complètement évaluée, et des précautions importantes doivent être prises en compte. Parmi celles-ci, même dans les régions les plus touchées par le changement climatique, l’augmentation du paludisme est minime par rapport à la réduction obtenue grâce aux mesures de santé publique telles que les moustiquaires, le contrôle des vecteurs et les traitements. Carlson souligne que nous devons reconnaître l’importance du changement climatique tout en reconnaissant que les interventions en santé publique ont eu un impact bien plus significatif.

Cette étude offre également de l’espoir que malgré le réchauffement climatique, la tendance à la réduction du paludisme sur le continent pourrait s’inverser d’ici le milieu du siècle si les mesures sont prises pour limiter le réchauffement climatique à 2°C.

Cependant, les conséquences peuvent être très différentes pour d’autres maladies transmises par les moustiques, comme l’indiquent les courbes de transmission de Mordecai. Certaines de ces maladies ont des seuils de température optimaux beaucoup plus élevés que la forme la plus mortelle du paludisme, ce qui signifie qu’elles pourraient connaître une augmentation plus significative due au changement climatique.

La dengue est une source de préoccupation majeure, avec déjà des centaines de millions d’infections annuelles et environ 20 000 décès estimés. Cette menace pourrait s’accentuer avec le réchauffement climatique. Contrairement au paludisme, dont l’impact varie selon les régions, le risque de dengue semble augmenter partout. De plus, l’urbanisation et une baisse des mesures de contrôle des moustiques contribuent à la résurgence du moustique Aedes aegypti, vecteur de la dengue, dans de nombreuses zones. Quant au paludisme, même s’il semble connaître des accalmies, celles-ci pourraient être de courte durée. Le moustique et le parasite pourraient s’adapter aux températures plus élevées. De plus, un autre moustique, Anopheles stephensi, porteur du même parasite, pourrait gagner en importance, notamment en raison de sa tolérance à des températures plus élevées, favorisant ainsi la propagation du paludisme urbain en Afrique.

Les défis sont tout aussi complexes pour les maladies qui ne se propagent pas par les insectes. Par exemple, la grippe suit un schéma saisonnier, avec des pics en hiver – et ce, non seulement parce que les gens se regroupent à l’intérieur, mais aussi parce que l’air froid et sec favorise sa transmission. Les changements de température et d’humidité de l’air affecteront certainement la propagation du virus, et peut-être même son évolution, mais de quelle manière exactement n’est pas clair. Communiquer toute cette complexité et cette incertitude est un défi. Des déclarations larges et facilement compréhensibles telles que « les agents pathogènes véhiculés par les moustiques prospéreront dans un monde plus chaud » peuvent être séduisantes mais trompeuses. 

Pourtant, transmettre les nuances – que le changement climatique pourrait finir par causer plus de paludisme dans certains endroits et moins dans d’autres – risque d’atténuer le message urgent selon lequel le changement climatique est une menace pour la santé publique. Quelques semaines seulement après une interview radio, le prochain défi de communication est survenu : un autre cas de paludisme transmis localement a été signalé, cette fois dans une région qui n’en avait pas vu depuis des décennies. Pourtant, le changement climatique n’est probablement pas derrière cette menace de paludisme.

Prévision des maladies

Les épidémies de grippe diminueront-elles dans un monde plus chaud ?
Culture de Champignons - https://www.science-technologie.com/
Les virus aéroportés, tels que ceux responsables du rhume, de la grippe ou du virus respiratoire syncytial, causent chaque année des milliards d’infections, soulignant ainsi l’importance de comprendre leur réaction au changement climatique. Cependant, les connaissances actuelles sur ce sujet sont limitées, à part le fait que différents virus réagissent différemment. Par exemple, la rougeole se propage efficacement dans tous les climats, ce qui laisse penser que le réchauffement climatique n’aura qu’un impact limité sur sa transmission. Pour ce qui est de la grippe, les études sur les animaux suggèrent un résultat différent. « Nous pouvons placer des cobayes dans des chambres environnementales et démêler les dépendances », explique une écologiste des maladies à l’Université de Princeton. L’humidité apparaît comme un facteur crucial : le virus se transmet mieux dans des environnements froids et secs, ce qui peut expliquer les épidémies de grippe hivernales. Avec le réchauffement climatique, qui permet à l’air de contenir plus de vapeur d’eau, les épidémies saisonnières de grippe devraient devenir moins sévères dans la plupart des régions. Cependant, il y a un revers à la médaille. Actuellement, la transmission de la grippe tombe souvent presque à zéro entre les épidémies. Avec des épidémies moins graves dans un climat plus chaud, le virus pourrait circuler toute l’année dans certaines régions, ce qui pourrait avoir un impact sur son évolution. Sans les pauses périodiques, l’évolution de la grippe pourrait s’accélérer, ce qui pourrait nécessiter une mise à jour plus fréquente des vaccins.  (voir cette article : Implications des changements climatiques et démographiques pour la dynamique et l’évolution de la grippe saisonnière) Quant au virus respiratoire responsable de la pandémie mondiale actuelle, le SARS-CoV-2, les scientifiques ne savent pas encore comment il réagira.
Un nouvelle époque pour le choléra
Lorsque l’Organisation mondiale de la santé a souligné en 2022 une augmentation des épidémies de choléra dans le monde, elle a énuméré les facteurs habituels favorisant les maladies hydriques : le manque d’assainissement, les crises humanitaires et les conflits. Mais elle a également souligné que le changement climatique aggrave la situation. Le choléra, causé par Vibrio cholerae, une bactérie produisant une toxine, se propage lorsque les matières fécales contaminent l’eau potable et les aliments. Depuis longtemps, on pense que des eaux de surface plus chaudes favorisent l’émergence de la bactérie. Si cela joue un rôle dans les grandes épidémies dans le monde, c’est contesté. Mais un autre lien avec le climat est clair : les inondations peuvent faciliter la propagation en provoquant le débordement des latrines dans les sources d’eau, tandis que les sécheresses peuvent augmenter la concentration de la bactérie dans les cours d’eau qui se réduisent et obliger les gens à utiliser une eau non potable. Le changement climatique rend ces événements météorologiques extrêmes plus fréquents, ce qui pourrait entraîner une augmentation du choléra dans un monde plus chaud. Cependant, il y a peu de consensus sur l’ampleur de cet effet en raison du manque de données à long terme fiables sur le choléra. Cela s’applique également à d’autres maladies diarrhéiques hydriques, que certains chercheurs soupçonnent également d’augmenter dans un monde plus chaud.
Les maladies fongiques vont-elles arriver avec le froid ?
Cela a été une surprise désagréable lorsque Candida auris a soudainement commencé à provoquer des infections mortelles en 2011. La levure était résistante à des classes majeures de médicaments et tuait plus d’un tiers des patients connus qui développaient des infections invasives. Encore plus surprenant, les infections à C. auris étaient apparemment apparues simultanément dans le monde entier. « Il n’y avait tout simplement pas d’explication plausible », déclare un microbiologiste à l’École de santé publique Bloomberg de Johns Hopkins. « Pourquoi un champignon qui n’est pas connu de la médecine apparaîtrait-il soudainement sur trois continents en même temps ? » Ce microbiologiste avait une hypothèse prête à être énoncée : le changement climatique.  Dans un article de 2010, lui et un collègue ont exposé un argument simple : les humains sont largement protégés contre les infections fongiques par leur température corporelle élevée, qui ralentit la croissance fongique. Mais à mesure que le climat se réchauffe, cette « barrière thermique » pourrait s’éroder à mesure que les champignons dans l’environnement s’adaptent à des températures plus élevées. C’est ce qui s’est passé avec C. auris, dit maintenant ce microbiologiste, et la même chose pourrait être attendue pour d’autres maladies fongiques. Pour l’instant, dit-il, ce n’est qu’une hypothèse. Mais en 2021, C. auris a été trouvé dans l’environnement, sur une île de l’océan Indien. La découverte suggérait que la souche infectieuse pourrait avoir son origine dans le sol, et non dans un hôte animal. Ces échantillons environnementaux se développaient mal à la température corporelle, suggérant qu’il avait fallu un bond évolutif – peut-être propulsé par le changement climatique – pour que le champignon devienne mortel.

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